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    Histoire de la CHAUSSURE

    Les chaussures à semelle de bois
    Occupation allemande 1939-1945
    par Fernande Germain

     

     

    Pendant la guerre de 39-40 et l'occupation allemande, nous étions un peu dépourvus de tout. Pour l’alimentation, il y avait les tickets de viande, de pain, de chocolat et bien d’autres denrées. Il en était de même pour l’habillement. Adieu les jolies bas de soie d’avant la guerre, ces chers bas qui faisaient de si belles jambes aux femmes !… Nous y faisions très attention. Nous avions appris à les remailler, avec un crochet très fin, le remaillage était assez facile lorsque seuls un rang ou deux étaient filés. Je me souviens encore que, pendant la guerre, étant privée d’électricité à certaines heures du soir, je me vois encore remailler mes bas, à la lueur de la lampe à pétrole, pour le lendemain matin. Il fallait avoir de bons yeux !

     

     

     

    Dès les beaux jours, nous nous mettions une teinture sur les jambes imitant les bas fins disparus des étalages depuis longtemps, économisant ainsi nos bas de soie encore en bon état. Les chaussures manquaient aussi terriblement ; ou tout au moins les chaussures élégantes. Aussi, à cette époque, tout cordonnier qui était tant soit peu chausseur, faisait des affaires d’or. Le bois étant facile à trouver dans notre région apparurent les fameuses chaussures à semelles de bois à talons compensés. A Loudun, rue du Portail-Chaussée, nous avions un artisan chausseur, Monsieur Baloge, qui était un très bon cordonnier et qui faisait des merveilles.

    Chaussures à semelle de bois pendant l'occupation allemande 1939-1945

    Chaussure à semelle de bois (photo 1946)

    Il restait à trouver le cuir, car il ne nous était pas fourni par l’artisan. Et c’est là que la chose devenait difficile. Du cuir ! les femmes en cherchaient partout : récupération de grands sacs à mains ou d’une ancienne veste en cuir usagée, dont certaines parties étaient encore récupérables. Pour mon compte personnel j’avais assez de chance car mon cousin cordonnier me fournissait des chutes de cuir, de couleurs différentes. Ces chaussures étaient très seyantes et faisaient de jolies jambes. Elles grandissaient les personnes. Elles n’étaient faites que de grandes lanières attachées sur le côté du pied par une boucle. (Voir photographie de gauche un modèle qui date de 1945).

     

     

     

     

    Un homme, très populaire à Loudun, avait une belle voiture de sport, décapotable, avec tout l’intérieur garni de cuir rouge. Un jour, ce dernier découvre à son grand étonnement, sa voiture lacérée de coups de couteau ou de ciseaux. Le cuir avait été découpé dans ses parties les plus belles, et ce qui restait était dans un bien triste état. Il n’en revient pas et raconte à ses amis sa mésaventure. Tous se demandent quel salopard avait bien pu lui en vouloir de la sorte pour lui causer un tel dommage.

    Quelle ne fut pas sa stupéfaction, lorsqu'il vit ses filles rentrer chez lui, chaussées chacune de splendides chaussures rouges à semelles de bois compensées. Il comprit instantément la provenance du cuir . Lui et ses amis n'avaient pas imaginé que le larcin pût provenir à sa propre famille. L'histoire ne dit pas si le père qui adorait et gâtait ses filles les admonesta ce jour là. Aucun de ses amis, n'osa plus lui parler de cette affaire.

     

     

     

    source : http://jcraymond.free.fr/Terroir/Temoignages/SemelleBois/SemelleBois.php

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