Les chaussures sont des accessoires plus qu’indispensables : utilitaires. Devoir assurer l'équilibre de la marche et la protection du pied ne les empêche pas d’être sensibles aux modes, parfois au mépris parfois du sens pratique.
Depuis le directoire, les chaussures de femmes sont sans talon. Le début du 19e siècle est dominé par les escarpins décolletés, souvent pourvu de rubans à croiser autour de la cheville. Ces sortes de ballerines sont si souples que pied gauche et pied droit sont identiques. Pour le jour, on fait aussi des bottines basses à laçage latéral ou frontal. Ces dernières bénéficient d’innovations techniques comme les oeillets métalliques en 1823 ou les goussets élastiques en 1827.
En 1830, le talon tente un retour à l'arrière de la semelle, la voûte plantaire étant soutenue par un cambrion ; mais il ne s’imposera vraiment que vers 1850. Sous le second Empire, les grands chausseurs parisiens comme Viault-Esté ou Pinet[1]fournissent des modèles à leur griffe en prêt à chausser, bien avant que la confection ne gagne le vêtement élégant. La machine à coudre les tiges, brevetée par B. Thimonier dès 1830, se répand dans les années 60.
La différenciation entre pied droit et pied gauche ne se généralise que vers 1870. Le talon bobine s’est alors imposé. Il perdurera pendant près d’un demi-siècle, sa hauteur culminant vers 1890. Pour le soir, des escarpins ou des chaussures à brides (souvent perlées) sont de rigueur. Pour le jour, les bottines à boutons dominent. Mais les chaussures basses se diversifient à la belle époque avec les Richelieu et les Derby, lacées sur le dessus, les Alexandra et les Charles IX à brides. Les Cromwell, dont les pattes de quartier se fixent par une boucle sur une haute languette, sont particulièrement en vogue à la veille de la grande guerre. Entre 1914 et 1919, le raccourcissement progressif des jupes découvre des chevilles gainées de longues guêtres boutonnées ou de bottines à talon cubain.
Les années 20 marquent le triomphe des chaussures basses, souvent particulièrement gracieuses. Si les modèles à bride dominent, on voit apparaitre des sandales pour l'été. Les créations de Gréco et de Pérugia se distinguent autant par l’audace de la recherche plastique que par leurs finitions raffinées.
Le soir, les talons sont parfois rehaussés d'émaux ou de strass. 1930 voit le retour de l'escarpin assorti à la robe habillée.
La seconde guerre mondiale, met fin à cet âge d'or, malgré l’inventivité avec laquelle les créateurs tirent parti des matériaux de remplacement : bois ou liège pour les semelles compensées, raphia ou toile cirée pour les tiges.
L'après-guerre est marqué par la collaboration entre les bottiers et les couturiers. J. Fath, J. Heim ou C. Dior s'adressent à Delman et à Roger Vivier. L'escarpin à talon haut est la chaussure élégante par excellence au temps du new-look.
Erwan de Fligué (Falbalas)